Pitgam
Histoire de la milice

Dans L'encyclopédie Méthodique, Art militaire, tome troisième éditée à Paris chez Panckoucke libraire, hôtel de Thou, rue des Poitevins de 1787 il est mentionné sous la rubrique milice:
"Corps d'infanterie formés d'hommes levés au fort dans les villes, bourgs & villages d'un royaume.
En France les hommes mariés sont exempts de la milice; elle est composée de garçons qui tirent au sort. Ils doivent être au moins agés de seize ans, & n'en avoir pas plus de quarante. Leur taille doit être de 5 pieds au moins; il faut qu'ils soyent en état de bienservir; on les assemble ensuite dans les principales villes de province, & on en forme des bataillons. Par ordonnance du roi du 17 février 1716, les milices de France formaient 100 bataillons de 12 compagnies, & chaque compagnie de 50 hommes. Les ordonnances du premier mars & 7 mai 1778 les ont portés à 106 bataillons, sous le nom de troupes provinciales.
sous ce point de vue nous allons examiner 1°. ce qu'étaient les milices jusqu'à leur dernier rétablissement en 1778; 2°. ce qu'elles sont à présent; 3°.enfin, ce qu'on pense qu'elle devrait être.
Qu'est-ce qu'étaient les milices jusqu'à leur dernier rétablissement en 1778?

Il ne paraît pas qu'on ait connu chez les anciens cette manière d'avoir des soldats, que nous employons parmi nous pour composer la milice.
......
Quelques écrivains ont voulu faire remonter l'origine des milices jusqu'à celle des communes sous Louis Le Gros, environ en l'an 1108; mais il ne paraît pas, quand on y réfléchit, qu'il y eût aucun rapport entre le communes & la milice levée de nos jours. pour les communes, il fut réglé que les villes leveraient elles-mêmes des troupes de bourgeois, pour les mener à l'armée au premier ordre; ces troupes marchaient sous la bannière du saint de la paroisse, le curé à la tête; au lieu qu'auparavant les troupes étaient levées par le sénéchal & marchaient sous ses enseignes.
D'après ces détails il ne sera pas difficile d'appercevoir que des troupes composées de bourgeois, tirés des villes, servant à leur frais & commandés par des chefs qu'elles choissisaient, ne ressemblent en rien à notre milice ni n'en sont l'origine.
Les francs-archers ne paraissent pas être davantage l'origine de la milice actuelle; rapportons quelques parties de l'ordonnance de leur formation, elles aideront à prouver ce qu'on avance.
Ordonnons qu'en chaque paroisse de notre royaume y aura un archer qui sera & tiendra continuellement en habillement suffisant & convenable, & seront appelés les francs-archers, lesquels seront élus & choisis par nos élèves en chaque élection, les plus droits & aisés pour le fait de l'exercice de taxe...,sans égards ni faveurs à la richesse & aux requétes qu'on pourait sur ce faire & seront tenus d'eux entretenir l'habillement susdit,& de tirer taxe & aller en habillement les jours ouvrables, & leur ferons payer quatre francs par homme pour chaque mois pour le temps qu'ils nous serviront... Ordonnons qu'ils & chacun d'eux soient francs & quittes, & ceux en exceptons de toutes tailles et charges quelconque, &c., l'an 1448.
On serait tenté de croire que cet établissement de Charles VII avait donné l'idée de celui qu'on forma sous Louis XIV an 1668; mais il ne paraît pas qu'on s'y soit conformé dans la milice actuelle.
Sous louis XIII, le cardinal Richelieu avait projetté , outre les troupes tenues de son temps sous les drapeaux, de former un corps de milice de 60000 hommes, toujours prêts à se rassembler & à marcher au premier ordre. Il ne paraît pas que ce projet ait eu lieu; on sait seulement qu'en 1638 Louis XIII voulant faire une levée de 3000 hommes de pied s'adressa à la ville de Paris, laquel manda aussitôt aux colonels de quartiers de faire recherche de ceux qui voudraient s'enrôler, & elle fournit ce contingent; mais cela n'est pas la milice de nos jours; on pourrait cependant croire que cet exemple à contribuer à faire accorder à la ville de Paris le privilège d'voir un régiment qui porte son nom, qui est composé au nombre des miliciens, & qui cependant n'est composé que de soldats enrôlés librement.
En 1688, Louis XIV fit lever 25050 hommesqu'il partagea en 30 régiments; chaque village fournit un ou plusieurs hommes; la paroisse fournissait le soldat tout équipé & tout armé; on n'était enrôlé que pour deux ans; cette institution comme on l'a dit plus haut, semble assez tenir à celle des francs-archers. Ces troupes furent congédiés à la paix de Riswick; on en revint à prendre des hommes dans chaque paroisse; mais on ne s'en servit que pour recruter les régiments.
Ce ne fut donc, à parler strictement, que sous Louis XV en 1726, qu'on commença à prendre dans les différentes villes & bourgs & villages du royaume, un certain nombre d'hommes désignés par le sort, qu'on les enrégimenta, qu'on leur fit faire la guerre, qu'on les licencia à la paix, mais toujours de manière à pouvoir les rassembler & s'en servir quand on le jugerait à propos; ce qui le prouve, c'est que les régiments provinciaux ne précèdent que les régiments créés depuis le 25 février 1726? ce qui semble établir inconstablement la véritable époque de la création de motre milice; institution reprise en 1743, pour laquelle on donna une ordonnance en 1743, qui statuait que l'on mettrait sur pied un corps de 74550 hommes; ordonnance qui fut changée en 1774 pour fixer le premier nombre environ à 44000 hommes, dont on forma 104 bataillons provinciaux, dont les grenadiers doivent composer 11 régimentsqui substituèrent jusqu'à M. de Saint-Geramin. Ce général, devenu ministre, qui se plaignait hautement que la France n'avait point d'armée, & qui ne paraissait occupé qu'à vouloir en former une, se hâta de réformer en entier les régiments provinciaux & ceux des grenadiers royaux, qu'il venait de voir donner si souvent des preuves de la plus grande valeur sous ses ordres & ceux des autres généraux; opération qui ne servit qu'à confirmer le public dans sa mauvaise opinion qu'il avait prise des connaissances de ce militaire en politique & en constitution militaire.
Qu'est ce que sont actuellement les milices depuis leur rétablissement en 1778?
....
En France, par l'ordonnance du 30 janvier 1778, on a rétabli les troupes provinciales, & on les a portées à 106 bataillons provinciaux.
24 bataillons forment 7 régiments destinés en campagne au service de l'artillerie, & 5 qui sont attachés à l'état-major de l'armée.
2 bataillons forment le régiment attaché à celui du roi.
2 batillons forment le régiment de Paris, qui est compris au nombre des troupes provinciales, quoique les soldats qui le composent soient enrôlés librement.
Les 104 bataillons forment, avec leurs compagnies de grenadiers, 13 régiments de grenadiers royaux.
Chaque régiment de grenadiers royaux est composé de 2 bataillons; chaque bataillon de 4 compagnies; chaque compagnie, par l'ordonnance du premier décembre 1781, d'un capitaine, 1 lieutenant en premier, 1 lieutenant en second, 2 sous-lieutenants, 1 sergent-major, 4 sergents, 8 caporaux, 95 grenadiers, & 2 tambours.
L'état-major, d'un colonel, d'un lieutenant colonel, d'un major, d'un quartier maître trésorier, d'un adjudant, d'un tambour major, & pour la guerre d'un aumonier & d'un chirurgien.
Chaque régiment provincial d'artillerie ou d'état-major est composé de 2 bataillons; chaque bataillon de 5 compagnies, dont une de grenadiers formant les régiments de grenadiers royaux, 4 de fusilliers; chacune de ces compagnies a un capitaine, 1 lieutenant en premier, 1 lieutenant en second, 2 sous-lieutenants, 1 sergent-major, 4 sergents, 8 caporaux, 115 fusilliers, & 2 tambours.
L'état-major comme celui des grenadiers royaux, excepté qu'il y a de plus 2 porte drapeaux par bataillon.
Le régiment de Paris même formation; mais ses compagnies de grenadiers n'entrent point dans la formation des grenadiers royaux.
Chaque bataillon de garnison est composé comme ceux des régiments provinciaux; mais l'état major ne consiste qu'en un commandant de bataillon ayant rang de lieutenant colonel, & 2 porte drapeaux.
La solde de ces troupes esy;pour les grenadiers royaux, colonel, 3000 livres, lieutenant colonel, 2500 livres; major, 2000 livres; & 240 livres pour son bureau; (ces trois officiers sont payés toute l'année en suportant les retenues de la capitation, les 4 deniers pour livre, les quittances,&tc.); quartier maître, 1080 liv., adjudant, 360liv.;tambour major, 270 liv.; chirurgien, 1200 liv.;aumonier, 600liv.; capitaine, 1260 liv.; lieutenant en premier, 720 liv.; lieutenant en second, 648 liv.; sous lieutenant, 600l.; sergent major, 324 liv.; sergent 276 liv.; caporaux, 186liv.; grenadiers, 132 liv.; tambours, 168 liv.
Pour les régiments provinciaux,colonel, 2000 livres, lieutenant colonel, 1800 livres; major, 1500 livres; & 120 livres pour son bureau; (payés toute l'année ); porte drapeaux, 600livres; quartier maître, 1080 liv., adjudant, 360liv.; tambour major, 270 liv.; chirurgien, 1200 liv.;aumonier, 600liv.; capitaine, 1260 liv.; lieutenant en premier, 760 liv.; lieutenant en second, 648 liv.; sous lieutenant, 600 liv.; sergent major, 306 liv.; sergent 240 liv.; caporaux, 168liv.; fusilliers, 114 liv.; tambours, 150 liv.
Pour les bataillons de garnison, commandant, 1600 liv.; & 120 liv. de frais de bureau (payé toute l'année); porte drapeaux , 600 liv.;; quant aux officiers, bas officiers & fusilliers, &ct., comme dans les régiments provinciaux.
Le colonel, commandant de bataillon & major du régiment attachés à celui du roi, jouissent des appointements de colonel, majors et commandant de bataillon de garnison & régiments provinciaux, & sont payés comme eux toute l'année.
Lorsque les régiments ne sont pas assemblés, les capitaines, lieutenants, sous- lieutenants de grenadiers royaux & les capitaines seulemnt des compagnies des régiments provinciaux & bataillons de garnison jouissent d'un mois d'appointement.
Quant aux officiers qui ont passé par le grade de soldat, ils recoivent par an, le capitaine, 360 liv.; le lieutenant en premier, 270 liv.; le lieutenant en second, 252 liv.; le quartier maître, 300 livres; le porte drapeus 216 liv.; & l'adjudant 198 liv.
Lorsq'on on assemble les régiments ou bataillons pour quelques mois ou quelques semaines seulement, les officiers recoivent alors (indépendamment de leurs appointements pour le temps de l'assemblée), deux mois d'appointements pour frais de voyage, & les bas officiers & soldats 2 s. par lieue pour venir de leur paroisse et y retourner.
Les enrôlemements sont de six ans; & le sort décide de l'homme qui doit être enrôlé.
Les paroisses fournissent à chaque soldat provincial de nouvelle levée, un chapeau, une veste, une paire de souliers, une paire de guètre, deux chemise de toile, un havresac, un col noir & un ruban pour les cheveux, & payent en outre 8 liv. en argent, dont 5 liv. pour le commissaire aux levées, & 3 livres pour chaque soldat de nouvelle levée.
On peut regarder comme assez arbitraire la manière dont sont formés les régiments provinciaux & les bataillons de garnison, ainsi que les appointements & la solde des personnes qui les composent; mais il n'en est pas de même des moyens que l'on emploie pour les recruter. cette troupe devient infiniment onéreuse au royaume par la manière dont on fait tirer au sort, par les personnes qui en sont chargées, & surtout par ces exemptions sans nombre qui réduisent à si peu de citoyens les individus obligés de tirer pour la milice, & dont encore la plus grande partie sont pris parmi les gens de la campagne, il serait trop long de rapporter ici le titre V, page 30 de l'ordonnance du premier décembre 1774, concernant les régiments provinciaux, à laquelle renvoye celle du premier mars 1778; ce titre contient plusieurs pages in-folio, dont sept sont toutes employées à exempter, presque sans exception, des citoyens qu'on aurait du soumettre au sort de préférence; les maux qu'occasionnent ces exemptions sont si fort connus de toute la nation, & les effets sont si funestes, qu'il eût bien moins nécessaire d'en parler que de chercher à y remédier, en s'occupant à trouver les moyens qui paraîtraient les plus avantageux.
3° Ce que devraient être les milices.
Un des grans vices de la constitution militaire actuelle, c'est non seulement la difficulté qu'on a même en temps de paix des recrues pour compléter les troupes qu'on entretient continuellement sur pied, mais encore la mauvaise espèce d'hommes que l'on recrute en général, & qui ne sont la plupart des enfants ou des libertins, que les premières marches, les instructions, les gardes, la mauvaise nourriture dont bientôt tomber malade, ensuite languir longtemps ou mourir.
Si l'onrencontre d'aussi grand obstacles à recruter pendant la paix, combien ne doit-on pas en trouver & n'entrouve pas en effet pendant la guerre? Nos armées d'ailleurs sont surchargées d'une si grande quentité de vivandiers, de vivriers, charretiers, domestiques, marchands, ouvriers &ct., que leur nombre surpasse quelque fois le nombre de combattants dont on peut avoir besoin. Que fait-on alors? on sacrifie des sommes énormes pour avoir des soldats, on employe tous les moyens de la fraude et de la séduction (encore la nécessité les rend-elle facile), & on remplit les armées d'enfants, d'étrangers, de vagabonds, de libertins, de gens cacochimes; enfin de tout ce que le royaume a d'hommes faibles ou viciés.
Ne voulant point remédier à des maux aussi cruels en changeant la constitution actuelle, au moins faut-il les diminuer en prenant des moyens plus avantageux à l'état, & moins à charge aux citoyens que ceux dont on s'est servi jusqu'à présent.
Précaution d'autant plus sage, qu'en s'attachant aux différentes ordonnances de 1776, l'armée sans y comprendre, les troupes provinciales, les carabiniers, la gendarmerie & la maison du roi devrait être composé de 231464 hommes, tandis qu'elle a à peine 140000 hommes ce qui fait un déficit de près de 100000 recrues qu'il faudrait se procurer au moment de la guerre."

Les données ci-dessus peuvent être compléter par le document concernant les milices provinciales sur le site Wikipédia.
Ci-dessous la teneur de l'ordonnance du 27 septembre 1765 qui est mentionnée dans les documents concernant Pitgam:
"Deux moyens ont existé pour tirer au sort :
•avant l'ordonnance de 1765, on inscrit le nom de chaque miliciable bon pour le service sur un papier. On tire autant de noms que de miliciens à fournir par la communauté,
•à partir de 1765, le chapeau contient autant de billets que de miliciables : tous sont blancs, sauf un ou quelques-uns portant le mot « milicien » selon le nombre de miliciens à obtenir. Ceux qui tirent le « billet noir » doivent servir pour la milice.
La deuxième méthode peut permettre, avec l'accord discret du subdélégué, de faire tirer le « billet noir » par un miliciable désigné comme volontaire, tout en respectant l'ordre de faire un tirage au sort."
milice table 1701 milice

Page créée par Stevenoot pierre le 19/08/10.