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les jeux de cartes sont disputés.... et les brasseurs
ainsi que les cabaretiers font d'excellentes affaires.

On recommence le mardi, c'est généralement le
grand jour, la fin suprême d'une suite de longs repas,
noyés dans une grande beuverie.

Ce jour-là a lieu aussi une messe solennelle pour
les parents défunts de la paroisse. Comme jadis, le
Flamand, attaché à ses vieilles traditions, croit bien
faire en associant l'Eglise à ses joies comme à ses
douleurs. Si, pendant ces jours de Kermesse, il
s'adonne aux réunions conviviales, aux agapes frater-
nelles et tumultueuses, il pense aussi à ses morts, et
c'est d'un air grave et recueilli que tous, en général,
assistent à l'office que célèbre le curé.

Les joies bruyantes, les danses et les chansons, ne
font pas oublier aux Flamands de Pitgam qu'autour
de leur modeste église, sous un épais tapis de verdure
claire, dorment pour toujours des êtres chers, qui
ont vécu une vie humble si douloureuse, sanctifiée
par le travail et le dévouement. Ils attendent là
l'auréole promise à ceux qui ont souffert, à ceux qui
ont eu foi en la suprême justice, en la suprême bonté.
Et le saint débonnaire, patron de la paroisse(1), semble
veiller sur eux. pendant que lentement tinte la vieille
cloche, comme pour rappeler dans cette matinée
d'espérance et de liesse, le souvenir de ceux qui
ne sont plus.

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(1) Saint Folquin
                                                                                      

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ARCHIVES DE PITGAM
« Les manuscrits poudreux, qu'on exhume du fond
des bibliothèques où, comme des momies, ils
dorment leur séculaire sommeil, réservent tou-
jours des surprises... »
(X...)


Les archives de la commune de Pitgam
remontent à l'année 1592. Elles compren-
nent encore environ 60 registres et quantité
de liasses presque indéchiffrables(1).

Malgré la poussière qui les recouvre, nous les avons
parcourues non sans éprouver quelque émotion.
Nous avons feuilleté page par page ces vieux regis-
tres, ces vieux parchemins, où sont consignés dans
un langage naïf et suranné, une grande partie des
affaires judiciaires d'autrefois. Saluons donc avec
respect, ces vestiges de l'ancienne justice féodale.
Ci-gît le passé, ci-gît l'ancien régime, le temps des
dîmes et des corvées. C'est la légende évanouie, c'est
l'histoire des siècles disparus : c'est surtout, l'éternelle
plainte de l'humaine souffrance, qui se débat en atten-
dant des jours meilleurs. Et ces feuillets jaunis, ces
procès-verbaux, ces constats de sergents illetrés,ces
grimoires illisibles, tous ces débris d'accusations ou
de défense,sont là comme de monotones radotages
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(1) Soixante liasses et registres écrits pour la plupart en flamand.

                                                                                            

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