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et le prend comme une maîtresse jalouse ; et il
s'attache à elle avec cette foi profonde que la terre
est la source de tous les biens et que ses durs labeurs
donnent à l'homme la force et la santé. avec le bon-
heur et l'aisance au foyer. - Aussi les théories collec-
tivistes et anti-sociales n'ont aucune prise sur l'âme
du campagnard et les apôtres des idées subversives
ou prétendues humanitaires savent bien qu'il n'y a
rien à glaner de ce côté. Le poëte de la bonne terre(1)
le fait comprendre en nous disant ce que serait l'Eden
que nous promettent les démolisseurs :
Debout et sus à ces maudits.
N'as-tu plus de fourche à l'étable,
Va, leur audace ne s'accroit
Qu'avec la peur que l'on vous croit,
Lève-toi le laboureur droit
Projette une ombre redoutable
Oui, cette vie dans la lumière du jour, loin des cités
malsaines, est bien la vie qui convient à l'homme, à
l'homme honnête et libre qui aime son clocher, son
village, sa famille et la bonne terre de grands-
parents. Mais, pour faire aimer ces champs
qui ont nourri nos pères, pour engager le paysan à
s'y fixer pour toujours comme jadis, les pouvoirs
publics ou, à leur défaut, les communes, devraient
faciliter l'accès de la petite propriété aux humbles,
aux honnêtes travailleurs de la terre, afin de leur
donner des habitudes d'ordre et d'économie, leur
faire entrevoir un but à atteindre et leur laisser au
coeur une espérance pour les vieux jours. Et ce but,
cette espérance en l'avenir, serait le petit champ, le
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(1) F. Fabie.
 
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rêve de leur jeunesse qui deviendrait, pour eux, ce
bon coin de terre Dien gord beetje land tant désiré.
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Maintenant que nous avons émis quelques idées
sur les avantages que procure la vie des campagnes,
jetons un dernier coup d'oeil sur cette vieille terre de
Flandre et reportons-nous par la pensée au temps où
les campagnes étaient prospères, où les centres mi-
niers ou industdes jeunes gens.
Lorsqu'on examine bien un village, on ressent de
suite l'impression des vieux âges, des siècles disparus.
Mais c'est une impression de tranquillité douce, une
aspiration, un regret vers le passé qui se révèle à la
vue de ces vieilles chapelles, de ces croix de bois
rappellant une mort subite, un crime, Un accident, et
qu'ont rencontre parfois aux carrefours des chemins.
Puis, ca et là, quelques petites masures aux formes
vieillottes, rabougries et naïves. avec leurs toits de
chaume qui projettent leur ombre au milieu des
prés verts.
Lec soleil, sans éclat, brille discrètement dans le
ciel pur et surplombe la plaine : il donne au vieux
clocher qui chante encore les heures, une vague tris-
tesse, venant des temps lointains ; et, ce ciel de Pitgam
gris,avec ses maisons basses,ces vieux moulins,cette
rustique église évoquent dans nos cœurs la douce
rèverie où se figent les choses ! C'est le passé de la
viellle Flandre, de la Flandre presque morte qui
ressuscite en nous...
 
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