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statuts synodiaux de chaque diocèse appuient sur ces
griefs, les commentent et les appliquent aux espèces
de temps et de lieu (1).
Défense est faite aux prêtres de fréquenter les
tavernes, cabarets et hôtelleries dans toute l'étendue
de leur juridiction ecclésiastique.
Cette chose ne leur est permise qu'en cas de
nécessité ou en voyage seulement.
Thomassin(2) dit qu'il avait menacé ses curés d'ac-
corder aux paysans de leur village (ce qu'ils avaient
demandé souvent) de pouvoir saisir leur cheval ou
leur manteau chaque fois qu'il les rencontreraient
dans un cabaret.
Il était aussi défendu aux prêtres de visiter les
foires à moins que ce ne fût, pour leurs affaires per-
sonnelles ou des achats de première nécessité.
Toutefois lorsqu'ils y allaient, ils ne pouvaient y
rester pour manger(3).
On comprendra facilement, cet excès de sévérité
la part des évêques pour les prêtres de leur diocèse,
les foires et les francs-marchés étant, à cette époque
éloignée, le plus souvent des lieux de plaisir et de
fête où les filles de joie et les courtisanes arrivaient de
tous points de la région.
Il leur était, en outre, défendu d'assister aux
représentations des jongleurs, des saltimbanques et
autres histrions, de jouer aux dés et à d'autres jeux,
d'avoir chez eux des faucons et des chiens de chasse.
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(1) L'Eglise et les campagnes au moyen-âge, par.Prevodt p.29.
(2) Op. cit. Tome 7, page 444
(3) Hurter op. cit. Tome I, p. 461
   
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Ils ne pouvaient, non plus accepter aucun office
séculier, tels due la charge d'intendant ou de bailly
d'une seigneurie quelconque. Ils ne pouvaient être
juge ni procureur, ni tuteur, ni curateur, ni avocat
devant des juges laïques, si ce n'était pour se dé-
fendre eux-mêmes ou des membres de leur famille.
Le curé devra encore moins se livrer au commerce.
Pourtant, dans certains villages, les maigres revenus
de la cure ne suffisent pas toujours ; alors les ordon-
nances diocésaines permettent aux prêtres dont les
revenus sont insuffisants de chercher un supplément
de ressources dans un métier honnête, insufficientes
dotati victum quoerant artificio honesto (1).
Les professions désignées spécialement, étaient la
copie des manuscrits, leur reliure, les dessins, l'enlu-
minure et tout ce qui se rattache à la confection du
livre. Certains, se sentant des aptitudes spéciales,
n'hésitaient pas à se livrer au commerce et parcou-
raient les foires et les marchés où ils réalisaient d'assez
gros bénéfices aux dépens de leur dignité. L'autorité
diocésaine mit bientôt fin a cet état de choses(2).
Certains fabliaux du moyen-âge nous représentent
le bas clergé avare et âpre au gain, lorsqu'il s'agit
des droits de son casuel.
Le Lai d'Hucline et d'Eglantine dit en parlant du
prêtre:
Quand une bière voit porter
Lors est seur de son souper ;
Mieux aimé un mort que quatre vis (vivants)
Toz nous voldrait avoir occlis(3).
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(1) L'Eglise et les campagnes p. 31.
(i) Abbé Morey op. cit, pages 57 et 58.
(3) A. Meray, la vie au temps des Trouvères p. 138.
   
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