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que le curé l'accompagne à la guerre. Cela s'est vu
souvent en Normandie ;dans ce cas,le seigneur devra
le nourrir, l'entretenir convenablement et pendant
qu'il remplira ainsi les fonctions d'aumônier, un
autre prêtre devra le remplacer dans la paroisse.
A certaines époques du moyen-âge, plusieurs
évêques défendirent, aux curés de servir d'aumônier
au seigneur. Il faut voir si le mot aumônier ne désigne
pas le chapelain, car cette fonction mettrait le prêtre
sous la dépendance immédiate du seigneur.
L'Eglise va même plus loin. Pénétrée des abus qui
auraient pu se produire à la longue, elle défend même
au curé de paroisse - à moins qu'il y ait urgence -
d'écouter la confession du seigneur, car l'Eglise sup-
pose, dans ces circonstances, qu'il n'est pas possible
a un prêtre de posséder assez de caractère ou d'in-
dépendance pour réprimander le seigneur et lui
infliger les pénitences en rapport avec les fautes
commises.
D'un autre côté, le prêtre pourrait tomber dans
l'excès contraire et profiter de sa situation excep-
tionnelle pour humilier le seigneur sous un futile
prétexte.
Par contre, il est permis au curé d'être l'aumônier
d'un seigneur quelconque autre que celui de la pa-
roisse. Dans ces conditions, il ne court aucun danger;
il reste indépendant puisque ce seigneur n'est pas le
sien et qu'il ne lui doit aucun devoir, ni honneur.
L'Eglise conseille aussi au prêtre de ne pas trop fré-
quenter le château. Le prêtre n'a rien à gagner au
   
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contact des grands. Adam de la Vacherie,en 1280,fait
un sermon sur ce chapitre et dit très bien :« les
prêtres sont gens de bien, ne font dans leur parti
culier que des choses bonnes, mais quand ils sont
avec les autres, comme par exemple avec de riches
bourgeois, des prélats, des seigneurs qu'ils en-
tendent parler, selon leur habitude, de leurs dé-
bauches, de leurs vains plaisirs, pour être toujours
bien traités, ils ne les blâment pas de ces mauvaises
actions, de ces coupables discours ; et non seule-
ment ils ne les reprennent pas,mais ce qui est pire
encore, pour leur plaire davantage, ils échangent,
quelquefois avec eux des propos bouffons ».
Bien avant cette époque, au temps des rois Carlo-
vingiens, le prêtre avait voulu dominer le château et
son orgueil vis-à-vis de son seigneur avait été souvent
réprimé par des édits ou par des lois. Les capitulaires
en font mention :« que les prêtres des paroisses
rendent à leurs seigneurs le respect qui leur est
dû, les hommages qui leur appartiennent, les ser-
vices de leur ministère, dont ils peuvent avoir
besoin, comme il est prescrit par les lois sacrées et
par les capitulaires et ainsi que c'était l'usage juste
et raisonnable du temps de notre père et de notre
aïeul. Si les prêtres ne le font pas, que les sei-
gneurs en instruisent les évêques, non par principe
et inhumanité, mais comme l'exigent la vérité et la
raison. Que les évêques, selon leur ministère et
selon les lois sacrées châtient les prêtres pour qu'ils
aient à s'amender ; que par un accord bienveillant
et nécessaire, les prêtres prient pour leurs sei-
gneurs et que les seigneurs puissent, d'un coeur
   
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